Créer une ferme à champignons : l’exemple inspirant de Titouan et sa champignonnière artisanale

Créer une ferme à champignons ne s’improvise pas. Derrière chaque récolte se cachent des mois de travail, des choix techniques cruciaux et une logistique minutieuse. Dans cet article, nous vous emmenons dans les coulisses du projet de Titouan, un myciculteur passionné qui partage en détail la relance de son activité dans ses nouveaux locaux près de Montauban. Une mine d’or pour celles et ceux qui souhaitent, eux aussi, créer leur propre ferme à champignons.

Un déménagement synonyme de nouveau départ

Titouan n’en est pas à son coup d’essai. Après une première installation à Caraman, dans la région toulousaine, il a dû quitter les lieux suite à un litige avec son propriétaire. Ce déménagement forcé, début 2024, l’a amené à reconstruire intégralement sa champignonnière, cette fois au nord de Montauban. Un projet ambitieux qu’il a mené seul, après s’être également séparé de son associé initial.

Cette étape souligne un point clé pour tout porteur de projet souhaitant créer une ferme à champignons : la stabilité juridique et foncière est primordiale. Avant de lancer les travaux, assurez-vous d’avoir un bail sécurisé ou, idéalement, une propriété.

Un espace repensé pour une production artisanale et maîtrisée

La nouvelle champignonnière est structurée en deux grandes zones :

  • Une zone “technique”, non isolée, dédiée aux tâches poussiéreuses : stockage des matières premières, fabrication et pasteurisation des substrats.
  • Une zone “propre”, isolée, destinée au travail en environnement contrôlé : inoculation, incubation et fructification.

Cette séparation est essentielle pour éviter les contaminations croisées, notamment entre les substrats bruts et les environnements stériles.

Stockage optimisé des matières premières

Titouan a choisi de travailler exclusivement avec des matières premières sous forme de granulés (châtaignier, chêne, luzerne, tourteaux, paille, son de blé bio). Pourquoi ce choix ?

  • Densité élevée (jusqu’à 750 kg/m³)
  • Moins de poussière
  • Facilité de stockage
  • Meilleure gestion des coûts, en particulier lors de hausses du prix de l’énergie

👉 Conseil : Si vous souhaitez créer une ferme à champignons, privilégiez les substrats faciles à manipuler, stockables en intérieur, et prévoyez au moins 6 mois de stock pour sécuriser votre approvisionnement.

La chaîne de fabrication des substrats : ingénierie artisanale

Titouan a conçu une chaîne de production complète et efficace :

  1. Trémie pour verser les sacs de granulés.
  2. Mélangeuse pour créer les recettes de substrat (par ex. feuillu + azoté).
  3. Vis sans fin motorisée pour transporter le mélange vers l’ensacheuse.
  4. Ensacheuse pneumatique artisanale pour produire des sacs de 4,5 kg.

Il teste actuellement plusieurs marques de sacs (Unicorn, Satri…), et prévoit une production de 100 à 200 sacs par semaine, soit jusqu’à 1000 sacs par mois à terme.

💡 Astuce : L’ensachage automatisé, même partiel, permet de gagner en régularité et en cadence. Pensez à anticiper cette étape dans le dimensionnement de votre ferme.

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Pasteurisation vapeur dans un Palox isolé

Titouan pasteurise ses substrats avec un système vapeur maison :

  • Un Palox doublé en panneau sandwich pour limiter les pertes thermiques.
  • Une “coiffe” amovible pour accélérer le refroidissement.
  • Une centrale vapeur alimentée en eau osmosée (via osmoseur) pour éviter le calcaire sur les résistances.

⚠️ Il insiste sur l’importance de la sécurité : une cuve tampon garantit qu’un cycle de chauffe puisse se dérouler entièrement, même en cas de coupure d’eau. Cela évite les surchauffes dangereuses des résistances.

Une approche rigoureuse de l’inoculation

Après pasteurisation, les sacs refroidissent devant des hottes à flux laminaire, dans la zone propre. Ils sont ensuite inoculés avec du spawn maison.

Titouan produit son mycélium sur grain (spawn) à partir de blé cuit dans une ancienne cuve de pasteurisation reconvertie. Il utilise ensuite un autoclave de 110 L pour la stérilisation.

Il planifie une production de spawn régulière, calée sur les saisons, pour adapter les variétés aux conditions climatiques. Un excellent réflexe quand on veut créer une ferme à champignons adaptée à son terroir.

Gestion de l’incubation : un compromis réfléchi

L’incubation est réalisée dans la même zone que le laboratoire, une solution provisoire en attendant de cloisonner davantage l’espace. Le principal défi : gérer la chaleur et le CO2 dégagés par le mycélium. Titouan compte sur son système de traitement de l’air (CTA) pour évacuer l’excès de CO2 et stabiliser le climat.

Deux chambres de fructification parfaitement pensées

Chaque chambre est équipée de :

  • Ventilation double (insufflation + extraction)
  • Préhumidification de l’air (gain de température en hiver)
  • Humidificateurs indépendants avec ventilateurs
  • Capteurs CO2, humidité et température

Les chambres sont réalisées en panneau sandwich 60 mm, un choix optimal :

  • Isolation thermique
  • Nettoyage facile (jet + javel)
  • Robustesse structurelle

Titouan y pratique deux types de culture :

  • Top-fruiting (shiitake, enoki, Black Pearl…) sur étagères spécifiques
  • Side-fruiting (pleurotes…) sur étagères verticales

Chaque chambre peut contenir jusqu’à 3 tonnes de substrat.

Nettoyage et hygiène : un modèle à suivre

Les chambres sont nettoyées régulièrement :

  • Jet d’eau + javel au sol
  • Bois des étagères traité au vinaigre ou en classe 4 autoclave
  • Pièges à glu et nématodes utilisés en cas de présence de mouches du terreau (sciaridae)

💡 Titouan rappelle qu’un bois mal choisi (classe 3) se dégrade rapidement dans les chambres humides. Un détail essentiel pour celles et ceux qui veulent créer une ferme à champignons durable.

Récolte, conditionnement et conservation

Titouan conditionne ses récoltes à la main :

  • Récolte au couteau, nettoyage au vinaigre
  • Emballage dans du papier craft pelliculé
  • Stockage max 24h en chambre froide avant expédition

Il vend ses champignons au prix du marché, en se basant sur les cotations de Rungis (Irremer) sur 12 mois glissants.

Un système d’air conditionné artisanal mais malin

Le toit de la champignonnière abrite une chambre climatique : une tente de culture dans laquelle il peut installer une clim mobile ou un chauffage d’appoint selon les saisons. Cela lui permet de préconditionner l’air avant de l’envoyer dans les chambres de fructification, et de mieux résister aux canicules ou aux vagues de froid.

Filtration de l’air : une défense contre les contaminations

L’air entrant est filtré en deux étapes :

  • Préfiltre G4 (grosses particules, insectes)
  • Filtre M6 (poussières fines)
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Cela permet de protéger les substrats, notamment des contaminants issus de l’environnement agricole alentour.

Une logique artisanale, mais hautement stratégique

Ce qui frappe dans le projet de Titouan, c’est la rigueur de l’approche, malgré des moyens modestes :

  • Optimisation des flux (palettisation, ensachage, refroidissement)
  • Gestion fine des cycles de production
  • Matériaux bien choisis (panneaux sandwich, bois classe 4…)
  • Hygiène rigoureuse
  • Modularité (convoyeurs, trémies, système d’air adaptable…)

Créer une ferme à champignons ne signifie pas nécessairement investir des centaines de milliers d’euros. Mais cela suppose de faire les bons choix techniques au bon moment.

Vers un épisode 4 ?

Titouan prévoit déjà de nouvelles vidéos plus techniques sur :

  • La fabrication des substrats
  • La récolte et le conditionnement
  • Le travail en laboratoire

Il souhaite confronter ses plans à la réalité de terrain. Un état d’esprit précieux pour quiconque cherche à créer une ferme à champignons fonctionnelle et évolutive.

Conclusion

Créer une ferme à champignons, c’est à la fois un défi technique, logistique et humain. Le parcours de Titouan est une source d’inspiration concrète pour tous les porteurs de projet. En maîtrisant les bases (substrat, air, humidité, hygiène), on peut, avec des moyens raisonnables, construire une installation fiable et efficace.

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