MAT, UF et MG : pertinent en myciculture ?

MAT, UF et MG sont des abréviations de paramètres utilisés pour l’analyse de fourrage pour le bétail et dans d’autres domaines agricoles. En myciculture, la composition d’un substrat est essentielle. Alors est-ce que les notions de MAT, UF et MG sont pertinentes pour la culture des champignons ? Dans cet article, je vais les analyser et tenter de vous donner des réponses.

Le paramètre MAT en myciculture

La Matière Azotée Totale (MAT) est une mesure de la teneur en azote d’une matière organique. Elle est donc couramment utilisée en agriculture pour répondre aux besoins spécifiques des animaux en protéines pour optimiser leur santé, leur croissance, et leurs performances productives.

En myciculture, cet indicateur peut sembler pertinent, car les champignons nécessitent de l’azote pour leur développement.

La matière azoté total MG est utile en agriculture, mais qu'en est-il précisément en myciculture ?
Représentation d’un protéine 3D et de champignons comestibles

Le paramètre MAT est-elle utile en myciculture ?

Comme je viens de le dire, l’azote est indispensable pour la synthèse des protéines, enzymes et autres molécules nécessaires au développement du mycélium. Des matières riches en MAT, comme le son de blé ou les drêches, enrichissent les substrats pauvres en azote (sciure, paille, etc.) et équilibrent les besoins nutritionnels des champignons.

Cependant, la simple mesure de la MAT ne donne pas une vision complète des qualités d’un substrat pour champignons. Elle ne prend pas en compte d’autres paramètres cruciaux comme le carbone, qui peux être retrouver dans le rapport C/N, donc le rapport Carbone/Azote.

Quel est le lien de calcul entre MAT et C/N ?

Et bien simplement, la MAT (Matière Azotée Totale) correspond à la partie « N » dans le rapport C/N (Carbone/Azote). Cependant, pour calculer le C/N, il est donc nécessaire de connaître également la proportion de carbone dans une matière.

La formule pour calculer le rapport Carbone/Azote (C/N) si on y inclut la MAT est la suivante :

Vous pouvez généralement trouver les références de C/N, les % d’azote et les % de carbone des matières utile en myciculture sur internet.

Conclusion sur le paramètre MAT

La MAT est un paramètre utile pour évaluer la quantité d’azote dans un substrat, élément indispensable au développement des champignons. Cependant, pour être pleinement exploitable, elle doit être complétée par le carbone total, également crucial pour la croissance fongique.

En combinant le N total (MAT) et le C total, il devient possible de calculer le C/N, un indicateur essentiel pour formuler des substrats équilibrés et adaptés aux besoins des champignons.

Le paramètre MG en myciculture

Les Matières Grasses (MG), représentant la teneur en lipides d’un aliment, elles sont un paramètre central en nutrition animale. Avec leur densité énergétique élevée, elles jouent un rôle crucial pour les performances des ruminants. Mais qu’en est-il des champignons ?

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la matière grasse MG est un facteur qui permet la croissance des ruminant, mais peut-il être utiliser en myciculture ?

Les MG en nutrition animal

En agriculture, les matières grasses se distinguent par leur forte densité énergétique : elles fournissent environ 2,25 fois plus d’énergie par gramme que les protéines ou les glucides. C’est pourquoi elles sont indispensables dans les rations destinées aux animaux.

Tout d’abord les ruminants qui digèrent les lipides grâce à des enzymes comme les lipases et à des processus microbiens spécifiques comme la biohydrogénation dans le rumen.

Et les animaux monogastriques (porcs, volailles) qui eux absorbent directement les lipides pour soutenir leur croissance rapide ou leur production (viande, œufs).

Les MG sont-elles pertinentes en myciculture ?

À première vue, les matières grasses pourraient sembler intéressantes pour les champignons. Après tout, leur densité énergétique pourrait contribuer à la croissance et à la fructification. Mais la réalité est plus nuancée.

Il existe en effet des champignons comme les pleurotes qui sont capables de découper les matières grasses à l’aide de lipase pour les utiliser comme source d’énergie.

Les champignons privilégient largement les glucides complexes (cellulose, hémicellulose, lignine) comme source principale d’énergie. De plus les lipides sont faiblement utilisés et seulement en dernier recours, si d’autres sources d’énergie sont épuisées.

Conclusion sur les MG en myciculture

Les Matières Grasses (MG), bien qu’essentielles en nutrition animale, sont peu pertinentes en myciculture. Les champignons utilisent prioritairement les glucides complexes comme source d’énergie, et les lipides, même dégradables, ne sont consommés qu’en dernier recours. En myciculture, il est plus efficace de se concentrer sur des paramètres comme les glucides structuraux et l’azote des protéines pour optimiser les substrats.

Le paramètre UF en myciculture

L’Unité Fourragère (UF) est un indicateur énergétique largement utilisé en agriculture pour évaluer la valeur nutritionnelle des aliments destinés aux animaux. Bien qu’elle soit cruciale en nutrition animale, cette mesure est-elle adapté au métabolisme et des besoins énergétiques des champignons ?

L'unité fourragère UF est utilisé pour calculer l'énergie métabolisable par les ruminants. Peut-elle être utiliser par les champignons ?
représentation de l’unité fourragère

Pourquoi l’UF est-elle utilisée en agriculture ?

L’UF est un système conçu pour quantifier l’énergie métabolisable, c’est à dire est la quantité d’énergie qu’un organisme peut réellement utiliser pour ses besoins après avoir digéré et absorbé les nutriments d’un aliment.

Les ruminants (vaches, chèvres, moutons) ont des besoins énergétiques précis pour maintenir leurs fonctions vitales, produire du lait, ou favoriser leur croissance. En connaissant la valeur UF des différents aliments (foin, maïs, tourteaux, etc.), les éleveurs peuvent équilibrer les rations pour maximiser les performances des différents animaux.

L’unité fourragère est évaluée par rapport à une référence fixe : l’énergie métabolisable contenue dans 1 kg d’orge.

En soit, 1kg d’orge = 1 UF. Mais 1kg de maïs = 1,3 UF, car il contient plus d’énergie, et 1kg de foin de prairie = 0,7 UF, car il combien moins d’énergie qu’1kg d’avoine.

Par exemple, une vache laitière à besoin de 5 à 7 UF par jour. Cela correspondra en nutrition à :

  • 6kg d’avoine
  • ou 4,6kg de maïs
  • ou 8,6kg de foin

Passons maintenant à nos champignons.

L’UF est-elle pertinente pour les champignons ?

Pour savoir si l’unité fourragère est utile aux champignons, penchons nous sur leur système digestif : contrairement aux ruminants, qui possède un système digestif interne, les champignons ont un système digestif externe. En effet, pour digérer des aliments, Ils libèrent des enzymes extracellulaires, qui sont des genres de ciseaux moléculaires pour dégrader les composés complexes en formes plus simples qu’ils peuvent absorber.

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Deuxièmement, l’UF se base sur l’énergie métabolisable après digestion par les animaux, mais les champignons n’ont pas les mêmes capacités enzymatiques que les ruminants.

Par exemple si l’on prend 1 UF donc égale à 1kg d’avoine, l’énergie métabolisable par les ruminants est réparti de cette manière :

  • Lipides : ~5-7 % de l’énergie de l’UF.

Comme on vient de le dire avec les MG, en termes de lipides, les champignons utilisent des lipases extra-cellulaires qui leur permette de découper les molécules lipidiques pour s’en nourrir. Mais leurs appétence pour les lipides est faible, et ils ne les consomment qu’en dernier recourt. Alors qu’au contraire, les ruminants peuvent pleinement exploiter cette source d’énergie par des lipases et de la biohydrogénation.

  • Glucides : ~75-80 % de l’énergie de l’UF.

Les champignons ne peuvent pas dégrader certains glucide, comme par exemple l’amidon contenu dans le maïs. Dans ce cas précis, la consommation d’une quantité donnée de maïs pour les ruminants, aurait une quantité énergie assimilable plus faible pour les champignons.

Mais ils peuvent décomposer des glucides plus complexes comme la lignine qui ne peuvent pas l’être par les animaux par exemple. Cette réflexion est applicable aux autres aliments qui peuvent être données à la fois aux champignons et aux ruminants.

  • Protéines : ~12-15 % de l’énergie de l’UF.

Pour les protéines, les mécanismes de digestion sont très différents. Même si les champignons savent digérer enzymatiquement certaines protéines simples, les ruminants sont beaucoup plus efficaces en termes de digestion protéique.

En effet, ils utilisent des enzymes, mais également la fermentation avec plusieurs estomacs spécialisés, ce qui leur permet de tirer davantage d’énergie de la digestion des composés protéiques simples et complexes. Ils peuvent également tirer efficacement de l’azote de source non protéique.

Conclusion sur l’UF

L’Unité Fourragère (UF), conçue pour évaluer l’énergie métabolisable des aliments chez les animaux, n’est pas pertinente pour les champignons. Leur système digestif externe et leurs enzymes ciblent des composés spécifiques comme la cellulose, l’hémicellulose et la lignine, contrairement aux ruminants qui exploitent efficacement l’amidon, les protéines complexes et les lipides.

En myciculture, il est plus pertinent d’évaluer des paramètres comme la quantité de cellulose, d’hémicellulose et de lignine, ainsi que le C/N vu précédemment.

Conclusion sur MAT, MG et UF en myciculture

En résumer sur l’analyse des paramètres MAT, MG, et UF en myciculture :

  • La MAT, représentant la teneur en azote, est un paramètre utile pour évaluer les besoins des champignons en nutriments azotés. Cependant, pour être pleinement exploitable, elle doit être complétée par la teneur en carbone total, afin de calculer un rapport C/N équilibré, essentiel pour la croissance fongique.
  • Les MG, bien que centrales en nutrition animale pour leur densité énergétique, sont largement inutilisées par les champignons. Ces derniers privilégient les glucides complexes et ne consomment les lipides qu’en dernier recours, lorsqu’ils n’ont pas d’autre choix.
  • L’UF, conçue pour évaluer l’énergie métabolisable chez les animaux, n’a pas de pertinence en myciculture. Les champignons, avec leur système digestif externe, ciblent des composés spécifiques comme la cellulose et la lignine, ignorés dans le calcul de l’UF, tandis qu’ils ne tirent que peu d’avantages des lipides et des protéines complexes.
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Bien que ces paramètres aient une grande utilité dans d’autres domaines agricoles, leur pertinence pour la myciculture est limitée. Pour optimiser la composition des substrats, il est préférable de se concentrer sur des mesures spécifiques comme le rapport C/N, la teneur en cellulose, hémicellulose, et lignine, ou encore le pH et l’humidité qui répondent davantage aux besoins réels des champignons.

Merci d’avoir lu cet article sur « MAT, UF et MG : pertinent en myciculture ? ». Si vous avez des questions ou des remarques, n’hésitez pas à nous laisser un commentaire 🙂

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