Il y a tellement de champignons comestibles à cultiver que j’ai souhaité vous écrire un petit guide pour vous aidez à faire votre choix, suivant votre projet. Que vous soyez particulier, ou professionnel, il est important de bien choisir le champignon que vous allez cultiver, car c’est une culture qui n’est ni animale, ni végétale. D’où l’intérêt de bien comprendre comment il fonctionne et de quoi il a besoin. Ainsi il sera plus facile de le faire pousser et de profiter de l’expérience. Dans cet article, je vais vous guider vers le meilleur choix du champignon comestible à cultiver, pour le fun, pour la passion, pour la science, pour le business, mais surtout pour vous !
Le champignon comestible que je veux cultiver est-il dur à faire pousser ?
Tous les champignons ne mangent pas la même chose
Nos amis fungis ne se nourrissent pas de la même chose. Certains sont des goinfres pouvant manger tout et n’importe quoi. D’autres sont de fins gourmets et ne se satisferont que d’une fine nourriture gastronomique, que seul les chefs myciculteurs étoilés parviendront à leurs préparer, non sans difficultés.
Comme vous vous en doutez, plus la nourriture d’un champignon sera complexe à réaliser, plus sa culture mettra au défi vos capacités culinaires ! Documentez-vous bien sur la manière dont se nourrit votre champignon, car il en existe trois grandes catégories, que nous allons de suite voir..
Les champignons saprophytes décomposeur primaire
Ces champignons contribuent à la dégradation de la matière organique brute et fraiche, comme des troncs, des branches, en la restituant au sol sous forme minérale. Ils ont un rôle important de recyclage dans les écosystèmes.
Si votre champignon est un décomposeur primaire, il faudra le nourrir avec une matière ligneuse, comme la sciure ou la paille. La liste des matières organiques dont il peuvent se nourrir est énorme ! Ils sont les plus simples à satisfaire gustativement parlant.
Quelques exemples de champignons décomposeur primaire :
- Le pleurote ( Pleurotus spp.) jaune, rose, à huitre, eryngii et j’en passe !
- Le shiitaké ( Lentinula edodes)
- L’hydne hérisson ( Hericium erinaceus)
- Le nameko ( Pholiota nameko)
- Le réishi ( Gonoderma lucidum )
Les champignons saprophytes décomposeurs secondaires
Ces champignons continuent à décomposer la matière organique qui l’a été, soit par des champignons décomposeurs primaires, soit par d’autres organismes ( comme les bactéries présentes dans la flore digestives des bovins et autres animaux parents ). Ils vivent dans un milieu qui possède un écosystème relativement riche en biodiversité, comme les prairies ou à proximité des élevages. Insectes, bactéries et autres fungis les côtoient. Ils sont un peu plus difficiles à satisfaire, car ils ne développeront pas d’appétit, et ne grandiront pas sans convives, notamment unicellulaire, à leur table, avec qui, ils aiment échanger la nourriture et communiquer.
Si votre champignon est un décomposeur secondaire, celui ci appréciera du fumier composté ou encore un compost de végétaux bien mûr.
Quelques exemples de champignons décomposeurs secondaires:
- Les champignons de Paris ( Agaricus spp. )
- Le coprin chevelu ( Coprinus comatus )
- Le pied bleu ( Lepista Nuda )
Les champignons mycorhiziens
Cette dernière catégorie de champignons est la plus représentative du règle fongique, mais aussi la plus difficile à cultiver. Ils établissent des liens symbiotiques avec des bactéries dans le sol, mais également avec les racines des plantes. Le plus souvent un arbre. Pour les cultiver, il faut donc préparer à manger pour ces champignons, pour l’arbre et les bactéries, qui s’échangent une multitude de nutriments et de conversation à travers le sol. Ils sont extrêmement difficiles à satisfaire.
Si votre champignon est mycorhizien, sa nourriture dépendra profondément de la nature du sol, des espèces de bactéries et de l’espèce d’arbre avec qui il est associé.
Quelques exemples de champignons mycorhiziens:
- Les morilles ( Morchella spp.)
- Les cèpes ( Boletus spp.)
- Les chanterelles ( Cantharellus spp. )
Le champignon comestible que je veux cultiver a t-il déjà été cultivé par quelqu’un?
Ce que j’entends par « cultiver par quelqu’un », c’est de savoir si sa culture est populaire, si elle a déjà été réalisé un certain nombre de fois et qu’il y a des techniques qui se sont construites au cours du temps.
Oui !
Si la culture du champignon que vous avez envie de faire pousser a déjà été réalisée, vous avez surement des informations de disponibles dans les livres, les blogs internet et les vidéos Youtube.
Vous pouvez mettre au point un protocole de culture à partir des informations que vous aurez trouvées et l’appliquer tout simplement. Vous pouvez également vous former si vous êtes décidés à faire quelque chose de plus professionnel.
Non ..
Beaucoup de champignons n’ont jamais été cultivés à ce jour aux vues du nombre d’espèces qu’il existe.. quelle bonne nouvelle !
Si c’est le cas du champignon que vous souhaitez cultiver, il ne vous reste plus qu’à étudier vous même sa nutrition et son mode de vie. Dans le cas de champignon décomposeur primaire et secondaire, vous avez des chances de réussir votre expérience, en vous basant sur ce qui existe déjà.
Dans le cas des champignons mycorhiziens, leur écologie est tellement spécifique qu’il vous faudra faire des recherches approfondies au cas par cas. Regardez les publications scientifiques sur internet, sur des sites comme Pubmed. La biologie et l’anglais seront de mise!
Alors dur ou pas à cultiver mon champignon comestible?
Entre un Oui et Non, il existe tous les gradients possibles..
Globalement on peut classer les cultures de champignons en un niveau de difficulté allant de 1 à 10. Je les ai regroupés dans ce petit tableau:
| Déjà cultivé? / Type de décomposeur ? | Déjà cultivé | Jamais cultivé |
| Décomposeur primaire | 1 à 2 | 2 à 4 |
| Décomposeur secondaire | 4 à 6 | 6 à 9 |
| Mycorhizien | 9 à 10 | 10 + |
Comment choisir un champignon comestible à cultiver?
Vais-je faire pousser mon champignon comestible à l’extérieur ou à l’intérieur?
Suivant le lieu où l’on vit, on ne peut pas faire pousser tous les champignons à l’intérieur ou à l’extérieur. Le climat et les installations sont en général les facteurs limitants.
Cultiver les champignons comestibles en intérieur
La culture d’intérieur a des avantages sur le type de champignon que l’on peut y implanter:
- Des espèces qui ne sont pas naturellement adaptées à nos latitudes. Ex: Le nameko, qui a besoin d’une très forte humidité, aura du mal à pousser dehors, à moins que vous ne viviez dans une forêt très humide.
- Des espèces qui ne poussent pas en saison chez vous, par exemple en hiver, comme cultiver du pleurote jaune ( qui pousse plutôt en été), ou bien cultiver du pleurote à huitre (champignon d’hiver) en été. Vous l’avez compris l’inertie de la température est très importante dans ce cas là.
- Vous pouvez cependant cultiver les espèces comestibles de saison qui poussent sous vos latitudes en intérieur. La température ne sera pas un problème et vous contrôlerez plus facilement l’environnement. Ex: Cultiver le pleurote de panicaut au printemps.
Si vous adoptez la culture d’intérieur vous serez chargé de recréer l’environnement de vie de votre champignon. Une cave reste l’idéale, mais vous pouvez utiliser des tentes de culture, ou même votre cellier. Les conteneurs frigorifiques constituent une bonne alternative pour gérer une culture en intérieur.
La qualité de votre aménagement jouera bien évidemment sur la qualité de votre culture. La température, la lumière, l’air et l’humidité devraient être contrôlés pour s’assurer du meilleur résultat. Évidemment il faut donc connaitre les paramètres de culture de l’espèce que vous décidez d’implanter en intérieur.
Cultiver les champignons comestibles en extérieur
Les cultures en extérieur sont plus simple à gérer, mais leurs choix est par nature plus limités, vous pouvez cultiver :
- Des champignons adaptés naturellement aux conditions climatiques du milieu de culture. Il est essentiel que les fungis que vous installez à même le sol, sur des bottes de paille ou sur bûche, soient natifs géographiquement, ou au moins compatibles avec le climat si le but est d’installer une culture pérenne.
- Sous serre, il est possible de faire pousser des champignons tropicaux qui aiment fortement les chaleurs et de décaler la saisonnalité comme on le fait pour les cultures légumières. Par ex, cultiver des pleurotes jaunes et rose au printemps. Ces cultures ne seront pas pérennes vu que ces deux espèces ne supportent pas des températures sous les 10°C.
En quelle saison voudrais-je récolter ma culture de champignon en extérieur?
Comme pour les légumes ou les fruits, chaque espèce de champignons possède une saison favorable à la production de ses sporophores.
La saison des récoltes dépend principalement du champignon qui possède en sa génétique des traits qui le font fructifier lorsque le climat lui est favorable.
Les périodes d’implantations des champignons au jardin, ou en extérieur se font au printemps ou en automne. Certains champignons fructifieront la même année que leur implantation, d’autres espèces l’année qui suit. Le tout est de leur laisser convenablement le temps de coloniser le substrat que vous leurs avez fourni dans de bonnes conditions.
Voici un tableau des champignons en fonction de leurs mois de fructification, sous les latitudes Françaises :
| Variété/Mois | Jan | Fév | Mar | Avr | Mai | Juin | Juil | Aou | Sep | Oct | Nov | Dec |
| Shiitaké | x | x | x | |||||||||
| Pleurotes Jaune | x | x | x | x | ||||||||
| Pleurote bleu | x | x | x | x | ||||||||
| Pleurote pulmonaire | x | x | x | |||||||||
| Pleurote à huitre | x | x | x | x | ||||||||
| Pholiote changeante | x | x | x | x | ||||||||
| Nameko | x | x | ||||||||||
| Collybie à pied velouté | x | x | x | |||||||||
| Hydne hérisson | x | x |
La température des saisons influence également les champignons qui sont cultivés en intérieur, notamment si l’inertie en fraicheur est faible.
Ai-je des objectifs personnels dans la culture des champignons comestibles ?
Entreprendre de cultiver des champignons peut être une expérience magnifique, encore faut-il savoir comment on s’y engage..et pourquoi ?
Pour le fun !
Vous pouvez cultiver des champignons pour vous amusez, sans beaucoup d’attente, si ce n’est celle de prendre du plaisir. Concentrez-vous peut-être sur des espèces pour les débutants, sinon vous risquez d’être déçu du résultat. Les pleurotes sont vraiment simples à cultiver!
Pour la passion et la science !
Si vous avez de l’intérêt scientifique pour les champignons, sa biologie, sa reproduction ou son clonage, de nombreuses espèces vous satisferont, les champignons comestibles cultivés et sauvages ! Il est en effet possible de cloner et de reproduire des champignons sauvages pour en faire la culture.
Business plan !
Dans le cadre d’un business plan, je vous conseille d’office de cultiver des champignons dont les rendements sont connus sur des substrats spécifiques. Ainsi vous n’aurez pas de surprises. Les plus communs sont le pleurote, le shiitaké et le champignon de Paris. Si vous avez tout de même en tête de faire pousser d’autres espèces, pratiquez leurs cultures en parallèle dans un but de recherche et de développement. Une fois les résultats voulus obtenus, vous pouvez les inclure dans votre plan!
Un dernier conseil..
Cet article n’est qu’un ensemble de conseil. L’imagination et l’envie sont souvent de bonnes alliées, mais la connaissance et la patience sont des armes de vertus . Renseignez-vous correctement et commencer petit, l’expérience n’en sera que plus agréable. Comme pour le jardinier qui commence par planter des carottes plutôt que des tomates cerises, si vous commencez par de la Morille, vous risquez d’être frustré des résultats. Mais vous êtes votre propre mycélium, et vous êtes responsables de la fructification ou pas de vos idées!
Récap’
Vous avez à présent des éléments pour vous aidez à choisir le champignon comestible que vous allez cultiver. L’essentiel réside dans ces 5 questions :
- Comment se nourrit votre champignon?
- A t’il déjà été cultivé?
- Allez-vous le cultiver en intérieur? en extérieur?
- A quelle saison?
- Dans quel objectif?
Et vous alors? Quels champignons avez-vous décidé de cultiver? 🙂