Composition du substrat de fructification en myciculture [en 4 étapes]

Pour composer son substrat de fructification en culture des champignons, il est important de connaitre le résultat nutritif souhaitez et donc la valeur nutritif et fonctionnel des éléments qui le compose. Mais surtout de connaitre les besoins des champignons que vous souhaitez cultiver. Dans cet article je vous explique comment bien composer votre substrat de fructification en 4 étapes :

  • Connaitre le besoin de vos champignons
  • L’humidité du substrat
  • Le C/N du substrat
  • L’ajustement de la composition

Étape 1 : Connaitre les besoins des champignons pour réaliser la composition de son substrat de fructification

Chaque espèce de champignons à des besoins différent en fonction de son régime alimentaire. Ici, on parlera spécifiquement des substrats supplémentés pour les champignons décomposeurs primaires. Je ne parlerais pas des décomposeurs secondaires comme les champignons de Paris.

Les champignons de culture que la majorité d’entre nous cultivons sont des champignons saprophytes lignivores, c’est à dire qu’il pousse sur de la sciure, de la paille ou toutes autres matière proche du bois.

Grossièrement vous retrouvez 2 choses dans les substrats de fructifications supplémenté ( et non supplémenté d’ailleurs) :

  • Le carbone fournit l’énergie et les matériaux de base pour la construction des cellules fongiques. Il est principalement apporté par des matières organiques riches en fibres, comme la paille, la sciure ou les copeaux de bois.
  • L’azote est essentiel pour la synthèse des protéines et le développement cellulaire. Il est généralement ajouté au substrat sous forme de son de céréales, de farines de légumineuses ou éventuellement de fumier composté.

Par exemple pour un mélange de sciure de bois et de son de blé on peut retrouver ces proportions :

  • Le Pleurote en huitre (Pleurotus ostreatus) : 50% sciure de bois/50% son de blé
  • Le Maitaké (Griffola frondosa) : 70% sciure de bois/30% son de blé
  • Le Shiitaké (Lentinula edodes) : 80% sciure de bois/20% son de blé

Bien évidemment il y énormément d’autres matières premières différentes que vous pouvez utiliser comme :

  • La paille
  • Le marc de café
  • Les drêches de bière
  • Les rafles de maïs
  • Le carton

Les champignons ont donc des besoins en carbone et en azote qui sont parfois différent les uns des autres. On utilise le ratio C/N (carbone sur azote) comme repère nutritionnel pour le substrat. Il est très basique, mais est un bon indicateur pour la réalisation des substrats. Voici quelque valeur de C/N pour champignons populaire calculer à partir d’un % de céréale et de son de blé :

Espèce de champignon% Sciure / % Son de bléC/N idéal
Lion’s Mane (Hericium erinaceus)50% sciure / 50% son de blé29
Pleurote en huître (Pleurotus ostreatus)50% sciure / 50% son de blé29
Pleurote du panicaut (Pleurotus eryngii)55% sciure / 45% son de blé32
Chesnuts (Pholiota adiposa)60% sciure / 40% son de blé35
Pholiote du peuplier (Agrocybe aegerita)70% sciure / 30% son de blé45
Maitaké (Grifola frondosa)70% sciure / 30% son de blé45
Tramete (Trametes versicolor)80% sciure / 20% son de blé65
Shitaké (Lentinula edodes)80% sciure / 20% son de blé65
Réishi (Ganoderma lucidum)85% sciure / 15% son de blé80

Si vous souhaitez approfondir le C/N vous pouvez lire cet article : le ratio C/N.

Étape 2 : Connaitre la quantité d’humidité du mélange

Pour croître efficacement sur le substrat, les champignons nécessitent de l’eau pour maintenir leur hydratation. Celle-ci permet de solubiliser les nutriments présents dans le substrat, facilitant ainsi l’action de leurs enzymes extra-cellulaires qui décomposent la matière organique en molécules assimilables.

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Équilibre en eau des substrats

  • Avec trop d’eau, il y aura un manque d’oxygène dans le substrat, le mycélium va mal respirer et il vas en souffrir. De plus, ces conditions d’anaérobiose pourrez favoriser l’apparition de certaine bactéries anaérobies.
  • Avec pas assez d’eau, le mycélium se sera pas assez hydraté et ne vas pas se développer correctement.

Dans un substrat, la quantité d’eau varie environ de 60 à 70%. Si vous êtes plutôt en sciure ou pelet, je vous conseil 60% d’hydratation et en paille autour de 70%.

Donc je parle ici d’eau total. C’est à dire que si initialement votre substrat combien 10% d’eau, il faudra le prendre en compte dans votre calcule. Cela va également influencer les calcules de C/N par la suite. En effet, si vous mélangez massiquement [60% de sciure et 40% de drêche de bière humide], ce n’est pas la même chose d’un mélange [60% de sciure + 40% de drêche de bière sèche]

Remarque : Si les substrats sont secs par natures vous pouvez considérez 0% d’eau pour simplifier l’approche.

Calcule du % d’eau déjà présent

Dans le première cas, vos 40% de drêche de bière humide n’aurons pas la quantité de matière séche que la drêche de bière sèche. Dans le premier cas, le poids sera en partie du à un % d’eau.

Donc pensez bien à déterminé le % d’eau avec une pesée avant/après au micro-onde par exemple ou bien en séchant la matière humide au four. C’est très important pour la suite, car le C/N ce calcule avec des masses de matières séches. Vous pesez 100g de matière et après séchage vous déduisez son poids des 100g pour trouver son humidité.

Exemple : J’ai peser de la drêche de bière avant (100g) et à sa sortie du four je trouve 25g.

  • % d’humidité de la drêche = 100g – poids sec de la matière
  • % d’humidité de la drêche = 100g – 25g = 75% d’humidité.

Exemple : J’ai un mélange qui a besoin de 0,800kg de drêche de bière. Mais, après calcule, l’humidité de ma drêche de bière est donc de 75%. Cela signifie que sur les 0,800 kg de drêche il y a 600g d’eau et donc seulement 0,200kg de matière séche.

Pour 0,800kg de matière sèche et avec 75% d’humidité (donc seulement 25% de masse sèche), on a donc :

  • Masse de la drêche humide = (masse sèche désirée)/(1-% d’humidité de la drêche)
  • Ce qui donne masse de la drêche humide = 0,800/(1-0,75)
  • Donc, masse de drêche humide = 3,2kg

Dans le cas d’un mélange de 2kg, avec 60% de sciure et 40% de drêche on aura besoin de :

  • 1,2kg de sciure
  • 3,2kg de drêche (dont 0,800g de matière sèche et 2,4L d’eau)

Il suffit ensuite de rajouté de l’eau. On sait que 60% d’eau pour 2kg de sciure représente 3L, donc 3kg d’eau.

  • Eau à ajouter = Eau total – eau présente
  • Donc eau à ajouter = 3 – 2,4
  • Alors, eau à ajouter = 0,6L pour obtenir 60% d’humidité.

Étape 3 : Connaitre les valeurs d’azote et de carbone pour calculer le C/N

Pour reproduire les ratios C/N idéaux du tableaux précédent à partir d’autres éléments, je vais vous montrer comment je calcule le C/N.

Si vous avez également un substrat donné qui fonctionne bien pour une espèce donnée, vous pourrez en calculer le C/N, et éventuellement le transposé avec d’autres matières.

Donc pour notre calcule nous avons besoin de plusieurs informations, pour chaque éléments du mélange :

  • Le % d’azote de la matière
  • Le % de carbone de la matière
  • Le poids de chaque matière dans le mélange.
SubstratC/N% Carbone% Azote
Sciure de bois40050%0.125%
Paille8045%0.560%
Drêches de bière1248%4.000%
Rafles de maïs6050%0.830%
Carton35045%0.130%
Son de blé1540%2.670%
Marc de café2048%2,4%
Tableaux des substrats, C/N et leur % de Carbone et d’Azote

Nous avons voir 3 méthodes pour car calculer le C/N, une classique et complexe, une méthode par tâtonnement et une méthode simple et moderne.

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Méthode classique et complexe: Calculer les quantités d’azotes et de carbones dans chaque matière

On vas faire le calcule pour un mélange avec 2kg de matière sèche de paille et de marc de café pour attendre un C/N cible de 30. Pour le calcule vous remarquerez que nous n’utiliserons pas directement le C/N de chaque matière, mais leur quantité total de carbone et d’azote.

  • Le C/N cible = Quantité total de carbone/Quantité total d’azote
  • soit C/N cible = (% de carbone de la Paille x masse de la paille) + (% de carbone du Marc de café x masse du marc de café)/(% d’azote de la Paille x masse de la paille) + (% d’azote du Marc de café x masse du marc de café)
  • alors C/N cible = (45 x masse de la paille) + (48 x masse du marc de café)/(45 x masse de la paille) + (48 x masse du marc de café)

Comme vous le voyez c’est une équation à deux inconnues : nous ne connaissons pas la masse du marc de café, ni la masse de la paille, pour attendre le bon C/N cible.

Je ne vais pas résoudre cette équation, parce que c’est relativement complexe et que je ne suis pas très bon en explication mathématique, mais sachez que le résultat est le suivant : Pour un C/N de 30, vous aurez besoin de :

  • 1,08 kg de marc de café
  • 0,92 kg de paille

Méthode simple : Calculer les quantités d’azote et de carbone dans chaque matière

Pour les autres, comme moi, un peu moins bon en math, je vous conseil la chose suivante : Vous partez d’un mélange 50/50 et vous ajuster en fonction du résultat. Pour l’exemple nous allons partir d’un mélange de 50 de sciure et 50 de drêche de bière.

SubstratC/N% Carbone% Azote
Sciure de bois40050%0.125%
Drêches de bière1248%4.000%
Tableaux des substrats, C/N et leur % de Carbone et d’Azote
  • Donc C/N cible = ((0,50×1)+(0,48×1))​/((0,00125×1)+(0,04×1))
  • Ce qui nous donne C/N cible = 23,7

Comment ajuster le résultat ?

  • Lorsque vous avez un C/N inférieur au C/N cible, il faut augmenter la quantité de carbone, donc de la matière avec le C/N le plus fort, dans notre cas la paille.
  • Si votre C/N est supérieur au C/N cible, il faut augmenter la quantité d’azote donc de la matière avec le C/N le plus faible

Concrètement ici on va augmenter la quantité de sciure étant donné qu’elle a le C/N le plus élevé, donc cela va augmenter la quantité de carbone dans le mélange et donc le C/N calculé.

Vous pouvez également ajuster le résultat en fonction de ce que vous obtenez en culture.

Méthode très simple : Calculer les quantités d’azotes et de carbones dans chaque matière

Il suffit de donner un prompt à chatGPT avec les bonnes informations pour qu’il puisse résoudre votre problème :

PROMPT : Pour 2kg de matière sèche et un C/N cible de 30, quel quantité de paille (%Carbone =45%, %Azote=0,56%) et de Marc de café ( %Carbone =48%, %Azote=2,4%) ajouter ?

Je veux que tu utilise la formule suivante : (% de carbone de la Paille x masse de la paille) + (% de carbone du Marc de café x masse du marc de café)/(% d’azote de la Paille x masse de la paille) + (% d’azote du Marc de café x masse du marc de café)

Remarque : la formule est très importante parce que naturellement chatGTP ne la calcule pas correctement ( à l’heure actuel), car il ne prends pas en compte le % d’azote et de carbone dans les substrats.

RÉPONSE : La résolution montre que, pour un rapport C/N de 30 avec une masse totale de 2 kg, il faut :

  • 1,08 kg de marc de café
  • 0,92 kg de paille

Étape 4 : Ajustement de la composition du substrat de fructification

La dernière étape consiste à vérifier par la pratique la théorie que vous venez d’appliquer. Même si elle est bien appliquer plusieurs variables peuvent être ajuster pour un meilleur résultat :

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De l’eau au fond du sac

Si après composition de votre substrat vous avez de l’eau au fond de notre sac, c’est qu’il y a un surplus d’eau. Ce problème peut être réglé de plusieurs manière :

  • Le temps : il est possible que le substrat est besoin d’un peu de temps pour absorber l’eau qui a été ajouter. Surtout si vous travaillez avec des sacs en polypropylène. Certaines matières comme les pellets se gonflent rapidement d’eau. D’autre comme la sciure en vrac demande parfois quelques heures pour pomper toute l’eau présente dans le sac.
  • L’humidité naturelle : certains substrat sont en apparence sec, mais on pourtant une quantité d’eau élevé. C’est le cas de la sciure fraiche, elle contient environ 20% d’eau. Elle va donc avoir une moins bonne rétention d’eau que de la sciure sèche, et potentiellement laisser un excès d’eau dans votre contenant de culture. La solution consiste à ajouter moins d’eau ou bien à obtenir une sciure sèche.
  • La granulométrie du substrat : C’est la taille des particules qui composent le substrat. Plus elles sont fines, plus les interstices sont nombreux et plus une quantité d’eau importante peut être retenu. Si la granulométrie du substrat est trop élevé, par exemple avec des copeaux de bois, vous aurez beau avoir mis la bonne quantité d’humidité dans votre conteneur, toutes l’eau ne sera pas absorbé. Ici, la solution est d’ajouter une matière avec une granulométrie plus fine, pour augmenter le nombre d’interstice, et donc la rétention immédiate en eau. Attention, le mieux reste de faire tremper directement les copeaux de bois dans de l’eau avant de les ajouter aux contenants pour qu’ils puissent se charger correctement en eau.

Contamination du substrat

  • Traitement : Il est possible de faire pousser des champignons avec de très bon rendements si le substrat est inférieur à un C/N de 30. Par exemple le Trametes versicolor à une croissance et un rendement maximal avec un C/N autour de 20, cela constitue un substrat très charger en nutriment et les méthodes de super-pasteurisation doivent ainsi être allongé pour diminuer la quantité de micro-organismes dans le substrat. Si cela ne suffit pas, je vous conseil de baisser le C/N, donc de réduire la charge en nutriment, cela permettra de diminuer le potentiel de contamination du substrat.

Le mycélium ne se développe pas

  • Inadaptation du substrat : Je vous ai parler de C/N dans cette vidéo, mais pour le carbone (C) il est présent sous diverse forme dans les matériaux de substrat, par exemple de la cellulose, de l’hemi-cellulose ou de la lignine. Par exemple, si on prend un substrat de sciure de bois, on a 50% de carbone dont 30% de lignine, soit 15% de lignine au final. Pour de la paille avec 45% de carbone, dans ces 45% de carbone ont retrouve seulement 15% de lignine ce qui correspond à moins de 7% de lignine au total. C’est pour ça que le réishi ne pousse pas bien sur de la paille : son arsenal enzymatique est conçu spécifiquement pour consommer la lignine avec des laccases, des ligninases et autres enzyme. Mais la paille est constitué en terme de composés carbonés, de cellulose et d’hemi-cellulose, adapter par exemple à la pleurote, qui a des enzymes de dégradations très variés. Donc n’hésitez pas à rechercher en profondeur les bases de substrats qui conviennent le mieux à vos champignons.
  • Pesticide/Fongicide : Si le mycélium ne se développe pas malgré de bons réglages de composition, il est possible qu’il n’y ai présence de composé dit antifongiques dans le substrat. C’est parfois le cas dans le pelet, qui peut être composé en parti de colle toxique pour l’agrégation des particules de sciures. Donc regarder les étiquettes et demander à vos fournisseurs pour être sur d’obtenir une matière de qualité.

Conclusion

En conclusion, la composition du substrat de fructification est une étape cruciale dans la culture des champignons. Il est essentiel de connaître les besoins spécifiques des champignons cultivés, notamment en termes de rapport C/N, d’humidité et de granulométrie du substrat. En ajustant ces paramètres, vous optimisez non seulement la croissance du mycélium mais aussi la fructification. Enfin, une surveillance attentive des caractéristiques du substrat, comme l’hydratation et les risques de contamination, permet de garantir des rendements optimaux. Cultiver des champignons avec succès repose sur une combinaison de science et d’observation pratique, et j’espère que cet article nous aideras à créer de meilleurs substrats !

Merci d’avoir lu cet article. Si vous avez des questions, n’hésitez pas à laisser un commentaire 🙂

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